Dons, legs, financements participatifs… Les Français ont de multiples possibilités pour exprimer leur générosité. Et ils s’en saisissent : le montant total de leur engagement annuel est de 7,5 milliards d’euros . Les sollicitations plus structurées et professionnalisées des organisations qui collectent et le cadre fiscal incitatif font partie des facteurs stimulants. Afin de mieux comprendre la réalité de la générosité en France, l’Observatoire de la philanthropie – Fondation de France lance le premier « Panorama national des générosités ».
Il est réalisé avec la contribution du CerPhi et en partenariat avec France générosités, l’Association française des fundraisers, le Centre français des fonds et fondations, Admical, le Don en Confiance et l’IDAF.
Que ce soit les particuliers – dons financiers ou matériels, legs, crowdfunding, quêtes sur la voie publique… – ou les entreprises via le mécénat, la générosité privée est estimée à 7,5 milliards d’euros en 2015. Cette mobilisation est en croissance : les Français sont, depuis dix ans, de plus en plus nombreux à déclarer leur générosité, dont les montants sont en hausse, et de nouvelles formes d’engagement se développent.
« Le chiffrage global de la générosité des Français était un objectif ambitieux et novateur. C’est la première fois que tous les acteurs du secteur se réunissent pour mieux comprendre la réalité de ce phénomène aux multiples visages », indique Daniel Bruneau, ancien président de France générosités et auteur de l’étude. « Les donateurs prennent conscience qu’ils peuvent jouer un rôle aux côtés de la puissance publique dans la prise en charge de l’intérêt général », souligne Laurence de Nervaux, responsable de l’Observatoire de la philanthropie – Fondation de France.
Non seulement les besoins sont importants – aide aux populations vulnérables, soutien à la recherche médicale ou encore préservation de l’environnement – mais surtout la philanthropie a le pouvoir d’agir différemment, en étant plus agile pour lancer des expérimentations et apporter de nouvelles réponses. Une action complémentaire à celle de l’Etat, encouragée par les possibilités de déductions fiscales.
Des Français de plus en plus nombreux à déclarer leur générosité
5,7 millions de foyers fiscaux ont déclaré des dons en 2015, soit 15% des foyers imposables. Le montant des dons déclarés est en nette croissance : 2,62 milliards d’euros au titre de l’impôt sur le revenu (IR), soit +70% depuis 2006. La progression est le résultat de l’augmentation du nombre de foyers déclarant des dons (+20%) et surtout du don moyen (+44%) qui est lié à la croissance du revenu imposable total (+28%).
La déduction fiscale au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), introduite en 2008, concerne 49 000 foyers, pour un total de 243 millions d’euros, soit près de 9% du montant total des dons déclarés par les particuliers. Et 75% de ces donateurs sur l’ISF sont également des donateurs sur l’IR.
De plus en plus d’entreprises mécènes
Le total estimé des dépenses pour le mécénat d’entreprise est de 2,9 milliards d’euros, dont 1,6 milliard de dépenses déclarées et 1,3 milliard d’euros de dépenses non-déclarées. Plutôt concentré auparavant au niveau des grandes entreprises, le mécénat se généralise. Plus de 61 000 entreprises s’engagent désormais. Ce sont surtout les petites et moyennes entreprises qui sont plus nombreuses à investir le domaine de l’intérêt général : le montant du mécénat déclaré par les entreprises ayant de 1 à 100 salariés est passé de 91 à 194 millions d’euros entre 2010 et 2015.
Les legs aux organisations philanthropiques, une manne importante
Quant aux legs, qui ne donnent pas lieu à une déduction fiscale, leur montant total était jusqu’ici mal connu. A partir de la constitution d’une base de données de 300 organisations bénéficiaires, l’étude les estime à près d’1 milliard d’euros. Près de 50% des legs sont au bénéfice de fondations reconnues d’utilité publique, comme la Fondation de France. Les trois causes qui mobilisent le plus souvent les testateurs sont la recherche médicale (23%), l’éducation (13%) et la solidarité (13%).
De nouveaux modes d’expression de la générosité
Même s’ils ne sont pas comptabilisés par l’administration fiscale, les dons non déduits des impôts représentent près de 40% de la générosité des Français.
Sur l’ensemble des fonds transitant par les plateformes de financement participatif ou crowdfunding, seuls 30% sont des dons, le reste étant soit des investissements, soit des prêts. De plus, seulement la moitié des bénéficiaires des dons en crowdfunding sont des associations relevant de l’intérêt général selon la définition fiscale . En 2015, année de référence du rapport, 29 des 50,8 millions d’euros sur les plateformes en ligne ont été adressés à des entreprises et à des particuliers, mais le montant des dons aux associations a nettement progressé depuis trois ans, passant de 13,7 millions d’euros en 2014 à 37,4 millions en 2016 .
Près de 50 millions d’euros sont collectés via des quêtes, réalisées soit sur la voie publique (9 millions) par des organisations comme la Croix Rouge ou le Bleuet de France, soit dans des espaces privés (3,35 millions) grâce à des urnes telles celles de la Fondation Ronald McDonald ou les Pièces Jaunes, ou encore via les opérations de terrain du Téléthon (35 millions d’euros).
Pour un grand nombre d’organisations d’intérêt général, les dons de denrées et objets par les particuliers sont une ressource indispensable. Seules les Banques Alimentaires valorisent en numéraire le montant de leur collecte. Ainsi le volume a minima de ce type de générosité s’élève à 39,5 millions d’euros pour 2015.
Enfin, la générosité embarquée (gestes du quotidien donnant lieu à des dons) est encore très faible en volume mais en nette progression, passant de 1 million d’euros en 2015 à 1,6 million en 2016, selon MicroDon. Elle est essentiellement le fait des arrondis sur achat (en caisse ou en ligne), pratiqués par une quinzaine d’enseignes (2 000 magasins), et des arrondis sur salaires, proposés par 280 entreprises en 2017.
La générosité privée destinée aux organismes publics
L’étude souligne que la sphère publique est elle aussi bénéficiaire de la générosité des Français, par le biais de dons ou de legs des particuliers et de mécénat des entreprises. Les opérateurs publics en sont les premiers récipiendaires (55 millions d’euros en 2015), puis viennent les collectivités territoriales (41 millions d’euros), et enfin les services de l’Etat (6 millions d’euros). En termes de domaines d’activité, la sphère culturelle publique arrive largement en tête, devant l’enseignement supérieur et la recherche.